Maman sans mamans

J’imagine que plusieurs me comprendront si je dis que lorsqu’on devient maman, on a envie et/ou besoin de pouvoir prendre le téléphone à tout moment pour appeler sa mère, sa soeur… Une maman de notre sang qui saura nous conseiller, nous écouter pleurer et répondre à nos mille questions. Tant lorsqu’on accouche que lorsque vient le temps d’élever l’enfant, de savoir comment on nous a élevé, comment c’était avec nous… Bref, de placer ses repères, de comparer, je sais pas.

Références: silence radio

Ma mère a décidé de partir lorsque j’avais 21 ans: je rencontrais mon chum, et ma mère s’enlevait la vie. Longtemps je lui en ai voulu puisqu’elle ne connaîtrait pas mon chum qui deviendrait mon mari, elle ne saurait jamais ce que j’aurai finalement fait de ma vie, n’aura jamais vu ma maison, n’aura jamais été grand-maman, ne m’aura jamais vue enceinte.

Mais ce dont je ne me doutais pas, c’est qu’elle me manquerait cruellement lorsque tous les questionnements de maman m’envahiraient. Avant de donner la vie, jamais l’idée ne m’était venue de discuter avec ma mère de plusieurs détails de mon enfance: ai-je été allaitée? est-ce que je pleurais beaucoup? comment me réconfortait-elle? quand ai-je marché? Et mon papa étant un papa, je n’ai eu que des à-peu-près un peu flous pour réponse (c’est pas un reproche, c’est juste la vie là).

J’avais aussi ma soeur heureusement, mais la vie me l’a aussi prise alors que Mini Puce n’avait pas encore deux ans. J’étais donc, peut-on dire, pas mal laissée à moi-même dans cette grande aventure. Ces femmes m’ont manqué et me manquent encore cruellement lorsque les étapes et premières fois se succèdent. Atrocement, même.

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Se forcer à suivre son instinct

Cependant, aujourd’hui, alors que Mini Puce a deux ans et demi, j’essaie de voir la chose plus positivement lorsque faire se peut, compte tenu des informations que j’ai pu cumuler. Je n’ai pas été allaitée, j’ai fait face à l’adultisme, je n’ai pas été portée, ni cododotée… J’ai toujours été de nature plutôt influençable et grégaire, si tout ça n’était pas arrivé, comment ou quand aurais-je su ce que moi je voulais en tant que maman, quel genre de parentalité je souhaitais adopter? Honnêtement, je ne sais pas. Peut-être trop tard, peut-être jamais?

Ce que ça m’a appris, c’est que l’instinct est la plus belle chose que l’humanité nous a léguée. Je n’en veux pas à mes parents, je crois sincèrement que tout le monde fait de son mieux avec ce qu’on a. Cependant, ce qu’on a aujourd’hui, c’est le pouvoir de s’informer aussi facilement que celui de se mettre les doigts dans le nez, et le choix nous appartient. Si j’avais été influencée, aurais-je fait le bon choix? Aurais-je fait MON choix? Aurais-je choisi mon instinct au lieu de suivre la vague? Aurais-je eu le courage de briser la vague et d’aller à contre-courant des croyances populaires? Aurais-je inhibé ou tut cette petite voix qui me disait que quelque chose clochait, sans savoir quoi? Aurais-je été jusqu’au bout de mes intuitions? Aurais-je eu le courage d’assumer mes positions et d’ainsi devenir un peu le mouton noir de la famille?

conclusion: prendre du recul pour mieux se rechercher

Je ne crois pas que j’aurais eu le recul nécessaire pour le faire, pas pour Mini Puce. Peut-être au deuxième enfant, mais prendre du recul, je m’en rends compte aujourd’hui, est nécessaire si on veut se trouver soi-même en tant que parent. S’éloigner des traditions, coutumes, habitudes, oui-dires, et adopter une approche introspective. Est-ce vraiment ce que je veux? Est-ce vraiment mon choix? Est-ce vraiment la bonne chose? Et surtout, rechercher, s’informer: on a la chance d’avoir accès à une source presqu’infinie de recherches, d’études, de livres, d’avis, d’opinions, de réflexions.

Maman Puce

Maman, grande soeur: vous me manquez. J’aurais aimé que vous soyez là pour tout voir. Ne vous inquiétez pas pour moi: je m’en sors bien, je me suis retrouvée dans tout ça. Je vous aime ❤
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Cachez-moi ce sein que je ne saurais voir!

J’avais beaucoup trop envie de mettre une photo de seins en couverture de cet article pour faire un pied de nez à Facebook et son discernement de marde, mais je vais me garder une p’tite gêne. Justement, j’ai envie de vous parler de ça aujourd’hui. Pas de discernement de marde, ben pas totalement du moins: la sexualisation de l’allaitement. Prenons une grande inspiration, et allons-y!

seins

OMG DES SEINS.

J’ai pas toujours allaité dans ma vie, j’ai pas toujours été maman, eh non! Moi aussi j’ai été jeune et j’ai lu plein de livres quand j’étais enfant. Je pense que le problème est là: la plupart des livres pour enfant montrent des biberons depuis un bon bout déjà. Aurait-on perdu la culture de l’allaitement en chemin? Je pense que oui, et je pense que c’est le coeur du problème: l’éducation sur la chose, ça commence quand on est petit.

Si tout ce qu’on voit depuis tout jeune, c’est le biberon: comment voulez-vous que le petit d’homme grandisse et trouve l’allaitement normal, alors que c’est ironiquement une des plus belles et naturelles choses que l’humain fasse?

Soyons directs: de nos jours, le sein est un objet socialement sexuel, et c’est correct dans vos chambres à coucher les amis. Mais en société, il faudrait se donner un peu de responsabilité et s’éduquer pour notre bien-être et notre santé, plus particulièrement pour celle de nos enfants car ce sont eux qui prendront la relève! Si toutes les mamans allaitaient, pouvez-vous imaginer combien on sauverait en sous, et nous en tant que citoyen, et nous en tant que société?

Je veux pas conquérir le monde là, je fais une projection utopique. Mais rendez-vous compte que c’est pas normal de ressentir le besoin de se couvrir lorsqu’on allaite pour ne pas choquer personne ou de sentir les regards inquisiteurs sur nous lorsque notre enfant décroche lors d’une tétée. Faut juste s’en rendre compte, parce que fondamentalement, biologiquement, historiquement, anthropologiquement… Y’a rien à s’offusquer d’un sein, surtout pas d’un sein qui sert à ce qu’il doit servir: nourrir un enfant.

La liberté d’un s’arrête où commence celle de l’autre

Je suis d’accord, tellement que je pense que si ça vous choque de voir une maman qui allaite son enfant, vous êtes totalement libre de regarder ailleurs et de réfléchir à la raison de votre outrage.

Elle fait quoi de mal, la maman? Devrait-elle n’allaiter que chez elle et trainer des biberons partout et ainsi risquer, pour le salut de votre santé mentale, que son allaitement n’échoue parce qu’il est trop tôt pour introduire le biberon? Devrait-elle, cette pauvre maman épuisée, s’empêcher de sortir et restée enfermée chez elle pendant les six mois d’allaitement exclusif recommandés par l’OMS? Devrait-elle, cette mère aux bonnes intention, couvrir son enfant d’un drap pour épargner vos chastes petits yeux alors qu’il fait trente degrés dehors? Ou encore, aller nourrir son enfant assise sur un siège de toilette entouré de quatre murs de tôle bien serrée, en entendant les bruits douteux d’expulsion de fluides corporels, à moins d’un mètre de son enfant qui sent sa mère fucking inconfortable?

Elle fait quoi de mal, la maman? Rien. Vous, par contre, je pense que vous avez un petit bout de chemin à faire dans votre tête. Toutes les espèces animales mammifères allaitent, et l’humain étant toujours un animal même si on peut construire des bombes atomiques, on allaite aussi. C’est pour ça qu’on a des seins, nous les femmes, et vous avez une bouche pour manger, des oreilles pour entendre. Ressentez-vous le besoin expresse de vous cacher pour manger afin de ne pas déranger les autres? Non? Alors pourquoi cet enfant devrait-il le faire, alors que sa mère le nourrit en plantant ses yeux pleins d’étoiles dans les siens? Quand l’enfant va manger des p’tits pots (s’il est pas au BLW, autre histoire), la maman devra-t-elle cacher sa cuiller parce que c’est offensant?

Déculpabiliser, encourager, enlever la crainte

Vous rendez-vous compte, au moins un peu, du ridicule de la chose? Est-ce qu’en tant qu’humain, citoyen, ami, parent… Ne sommes-nous pas capables de rendre la tâche plus facile à ces mamans en leur montrant qu’il n’y a rien de mal à allaiter, et qu’on peut bien sortir magasiner, prendre un café sans se compliquer la vie avec le regard des autres?

Ne pourrait-on pas plutôt se réjouir devant ce beau moment et féliciter la maman pour son beau travail, l’encourager et lui dire de ne pas lâcher? Pensez-vous que dans les premières semaines, on a juste ça à faire, s’occuper de ce que pensent les autres, en plus de la fatigue accumulée et des couches à changer?

Ça rendrait la vie plus facile à tout le monde: à vous qui ne seriez plus offusqué d’un si beau geste, et à cette maman qui est peut-être la plus timide du monde et qui hésite à continuer son allaitement de peur d’allaiter en public.

Win-win.